La réforme de la propriété en Chine

| Auteur:LI QIQING | Publié le:2024-03-12

Un peu d'histoire

La propriété publique des moyens de production est le fondement des rapports de production socialistes. Cependant, contrairement à ce que Marx et Engels avaient envisagé, le socialisme en Chine n'est pas sorti des entrailles d'une société capitaliste, mais de celles d'une société semi-coloniale et semi-féodale  économiquement et culturellement arriérée. Cela étant, il est primordial de savoir comment établir des formes de propriété qui correspondent aux nécessités du développement des forces productives en Chine. Relativement à cette question, la Chine a suivi un chemin tortueux qui a fourni des leçons à la fois positives et négatives.

Juste après la fondation de la République populaire, les dirigeants chinois n'ont pas mis en pratique la propriété publique unitaire que Marx avait en vue. Mao Zedong l'a souligné à la seconde Session plénière du septième Comité central du Parti : "S'il n'existait qu'une économie d'Etat et pas d'économie coopérative, il serait impossible pour nous de conduire l'économie individuelle pas à pas vers la collectivisation, impossible d'aller de la société de nouvelle démocratie vers la future société socialiste, et impossible de consolider la domination du prolétariat sur le pouvoir d'Etat. Quiconque néglige ou minimise ce point commettra aussi de très sérieuses erreurs. L'économie d'Etat est socialiste de par sa nature et l'économie coopérative est semi-socialiste ; ces deux secteurs, plus le secteur capitaliste, plus l'économie individuelle, plus l'économie de capitalisme d'Etat où l'Etat et les capitalistes privés travaillent ensemble, seront les secteurs clefs de l'économie de la République populaire et constitueront la structure économique de la nouvelle démocratie". Peu après la fondation de la République populaire, le produit du secteur industriel privé comptait pour plus de la moitié du produit total de l'industrie, et le volume du commerce de détail privé  représentait environ 85% de celui de tout le pays. Avec le développement économique, la proportion de l'économie régie par l'Etat a augmenté rapidement. En 1952 elle représentait 56% du produit industriel total. Pendant les trois années de la reconstruction économique, le secteur d'Etat, le secteur capitaliste privé, le secteur individuel, le secteur capitaliste d'Etat et le secteur coopératif se sont développés considérablement. La raison principale en est que les rapports de production étaient à l'époque compatibles avec le niveau de développement des forces productives.

Cependant, vers le milieu des années 50, nous fumes trop soucieux de presser le pas et nous sommes allés trop loin dans la transition. En 1956, la Chine avait pratiquement achevé la transformation socialiste de son agriculture, de son artisanat, de son industrie capitaliste et de son commerce, prenant un grand tournant de la propriété privée des paysans et des artisans vers la propriété publique collective des masses laborieuses et de la propriété privée des capitalistes vers la propriété publique de l'Etat, c'est-à-dire du peuple tout entier. L'achèvement prématuré de la transformation socialiste de la propriété privée est allé au-delà des exigences du développement des forces productives. En fait l'existence de la petite production marchande et de l'économie individuelle ou familiale était déterminée par le niveau de ces forces productives. Mettre en œuvre la propriété de tout le peuple ou combiner simplement la propriété du peuple entier et la propriété collective ne correspondait pas aux conditions spécifiques de la Chine. L'idée que plus le niveau de la propriété était élevé mieux c'était, était divorcée de la réalité. L'instauration des communes populaires en 1958 correspondait au triple objectif de "la grande taille, de la propriété publique et du caractère non composite". Les communes populaires voulaient transformer la petite économie dispersée en propriété du peuple tout entier et effectuer une rapide transition de la propriété collective vers la propriété de tout le peuple, alors que le niveau des forces productives restait bas. Ce qui violait gravement la loi des conditions objectives de la propriété et a bloqué le développement des forces productives. La propriété unitaire en Chine a duré environ deux décades, jusqu'aux lendemains de la révolution culturelle. En 1978 le secteur public représentait 99% du produit national brut, le secteur d'Etat y comptait pour 56% et le secteur collectif pour 43%, alors que le secteur privé ne représentait que 1%. Pendant ce temps, l'économie nationale est allée jusqu'au bord de la banqueroute.

 

Un choix historique : le tournant dans la réforme de la propriété en Chine.

La troisième Session plénière du 11° Comité central du Parti, qui s'est tenue en 1978, mit en avant de profonds ajustements des rapports de production "prématurés" : "Si nous voulons réaliser les quatre modernisations, nous devons accroître considérablement les forces productives. Ceci nécessite des changements dans les rapports de production et dans la superstructure en maint domaine, quand ils sont incompatibles avec ce développement, ainsi que des changements dans les modèles de direction, les manières d'agir et de penser". La Résolution sur certaines questions dans l'histoire de notre Parti depuis la fondation de la République populaire de Chine, adoptée lors de la sixième Session plénière  du 11° Comité central du Parti, en 1981, soulignait : "Le développement des rapports socialistes de production ne se fait pas selon un modèle fixe. Notre tâche fondamentale est de répondre aux exigences du développement des forces productives en Chine et de créer, à chaque étape, la forme concrète des rapports de production qui est compatible avec elle et qui facilite leur développement soutenu". Sur la base de la politique de réforme et d'ouverture, nous avons peu à peu forgé le principe de la propriété publique comme occupant une place dominante et des autres formes de propriété comme se développant à côté d'elle.

1° Etablir les rapports de propriété en partant de la notion de stade primaire du socialisme.

A la veille de la convocation du 13° Congrès du Parti, le camarade Deng Xiaoping l'a souligné sans ambages : "Le treizième Congrès de notre Parti expliquera à quel stade se trouve la Chine : au stade primaire du socialisme. Le socialisme lui-même est le premier stade du communisme, et nous, en Chine, en sommes seulement au stade primaire du socialisme - c'est-à-dire à un stade de sous-développement. Nous devons toujours partir de la réalité, et toute planification doit s'accorder avec elle". La structure de la propriété, au premier stade du socialisme, doit être déterminée par les forces productives. Or la Chine est très peuplée et a un produit national brut par tête très bas. La Chine est donc loin du stade de développement qui permettrait un degré plus élevé de propriété publique.

2° La coexistence de diverses formes de propriété ne signifie par un changement dans la nature socialiste de la Chine.

Jusqu'à nos jours l'humanité est passée par la société primitive, la société esclavagiste, la société féodale, la société capitaliste et l'étape sous-développée du socialisme. En dehors de la société primitive, aucune société n'a connu une forme unique de propriété. Le développement des forces productives est un processus graduel, et de nouvelles formes de propriété apparaissent graduellement au sein des anciennes formes, en sorte que, lorsqu'une forme de propriété se trouve en position dominante, il en existe d'autres, mais c'est celle qui est en position dominante qui définit la nature de la société. Garder la propriété publique en position dominante tout en ayant d'autres formes de propriété à côté d'elle est en accord avec cette vue du matérialisme historique[1].

Au 15° Congrès du Parti, tenu en 1997, il fut décidé que le système économique de base de la Chine consistait, pour le premier stade du socialisme, à conserver la propriété publique en position dominante et à laisser se développer à ses côtés diverses formes de propriété. Ceci a renforcé notre compréhension de la structure socialiste de la propriété et a soulevé des questions qui sont d'une grande importance théorique et pratique.

1° La question des diverses façons de mettre en œuvre la propriété publique.

Selon les actes du 15° Congrès du Parti, "la propriété publique doit et peut revêtir de multiples formes. Toutes les méthodes de gestion  et toutes les formes organisationnelles qui reflètent les lois concernant la socialisation de la production peuvent être sans crainte mises en pratique. Nous devons nous efforcer de trouver toutes les façons de réaliser la propriété publique qui favorisent grandement la croissance des forces productives". Ces formes sont principalement les formes d'organisation du capital dans les entreprises publiques ou dans celles où le capital public est dominant. A l'heure actuelle, les principales formes de la propriété publique sont : 1) Le secteur de la propriété mixte. Il s'agit du secteur public où la propriété publique est en position dominante et l'entreprise sous le contrôle du capital public. Dans ce nouveau secteur, le capital public, qui est en position dominante, et le capital privé, qui est en position dominée, coexistent dans la même entreprise, qui a la forme d'une holding. 2) Le secteur des sociétés par actions à capitaux mixtes. Cette forme organisationnelle des entreprises modernes peut être utilisée aussi bien dans le capitalisme que dans le socialisme. La nature des entreprises est déterminée par le contrôle des actions. Dans les sociétés par actions où l'Etat ou bien une collectivité détiennent le pouvoir de contrôle, le caractère public est clairement affirmé, ce qui favorise l'expansion de l'aire de contrôle du capital public et renforce le rôle dominant de la propriété publique. 3) Le secteur des entreprises coopératives par actions, c'est-à-dire la forme organisationnelle qui met en œuvre l'association des travailleurs dans le travail comme dans le capital. Le concept de "parts sociales" des travailleurs montre que ceux-ci sont en position dominante. Le secteur public mais non étatique de l'économie est un bon moyen pour réaliser une restructuration des actifs et pour optimiser la structure du capital.

2° Ce que signifie maintenir la propriété publique en position dominante.

Tout d'abord le secteur public de l'économie ne se compose plus seulement du secteur d'Etat et du secteur collectif avec une forme de propriété unique, comme dans l'ancien système, il comprend aussi les éléments étatiques et collectifs de la propriété mixte. Ensuite le fait de conserver le secteur public en position dominante n'est pas seulement une question quantitative et ne se traduit pas complètement en termes de proportions entre le secteur public et les secteurs non-publics. Il faut souligner le renforcement du secteur d'Etat du fait de sa qualité et améliorer une situation où le niveau de développement dans le secteur public est faible. La position dominante du secteur public se traduit principalement par son rôle dirigeant et par sa capacité de contrôle. C'est seulement en améliorant la qualité et l'efficacité du secteur public que nous pourrons consolider son rôle dominant.

3° La position du secteur non-public dans l'économie.

Selon les actes du 15° Congrès du Parti, "le secteur non-public est une composante importante de notre économie socialiste de marché". La mise en œuvre de la réforme pendant deux décennies a montré que les secteurs individuel, familial et privé de l'économie favoriseront le développement des forces productives encore pendant longtemps. Ils jouent un rôle positif en développant la production, en accroissant l'offre, en dynamisant l'économie, en stimulant le marché, en élargissant l'emploi, en satisfaisant des besoins, en augmentant les revenus fiscaux et en développant l'économie de marché[2]. Dans les conditions historiques spécifiques qui sont celles de la Chine, ils représentent une composante nécessaire de l'économie à l'époque du stade primaire du socialisme. C'est d'elle dont nous allons parler maintenant plus longuement.

 

Pourquoi la Chine socialiste encourage le développement de l’économie privée

Dans les amendements à la Constitution approuvés par la deuxième session de la Xe Assemblée populaire nationale, qui s’est tenue le 5 mars 2004 à Beijing, il est stipulé que la propriété privée sera protégée par l’Etat. On a pu reprocher de ce fait à la Chine de faire marche en arrière et même de trahir le marxisme en s’orientant désormais vers le capitalisme, un système source de tous les vices et de toutes les aliénations. En réalité, nous l'avons vu, le matérialisme historique et dialectique nous apprend que les formes de propriété dépendent du développement des forces productives et que la propriété des moyens de production est une catégorie historique. Le niveau des forces productives est la condition préalable de la substitution de la propriété publique à la propriété privée. Certes, nous poursuivons toujours notre objectif qu’est le communisme, et  pour ce faire, il faudra abolir, en fin de compte, la propriété privée. Mais c’est un processus historique naturel et non arbitraire.

 

Vitalité et effets positifs de l’économie privée

La pratique est le seul et définitif critère de la vérité. Les faits sont les plus convaincants. Récemment, la Fédération nationale de l’Industrie et du Commerce de Chine a publié un rapport — le premier du genre en Chine — où l’on procède à une étude à la fois générale et systématique de la croissance de l’économie privée chinoise. En faisant le bilan du développement de cette dernière depuis l’application de la politique de réforme et d’ouverture sur l’extérieur, ce rapport expose les nouvelles caractéristiques de l’économie privée chinoise, les problèmes saillants qui se posent au cours de son développement et les tendances de son évolution future.

1. L’économie privée est devenue la force principale du développement économique d’un grand nombre de régions.

Jusqu’ici, 6 provinces ou municipalités relevant directement de l’autorité centrale (le Jiangsu, le Guangdong, le Zhejiang, Shanghai, Beijing et le Shandong) ont vu chacune le nombre de leurs entreprises privées dépasser 200 000. Cela veut dire que leur somme représente environ 60% de l’ensemble des entreprises privées enregistrées dans le pays. D’un point de vue général, on constate que plus l’économie privée est développée dans une région, plus sa croissance économique est rapide ; la preuve en est que les 6 provinces (ou municipalités) qui disposent du plus nombre d’entreprises privées font en même temps partie des régions économiquement les plus développées du pays. Prenons l’exemple du Zhejiang : avec plus de 60% de ses revenus fiscaux provenant des entreprises de propriété non publique, l’économie privée y est d’ores et déjà devenue la principale source des rentrées budgétaires. L'exemple de Shanghai est encore plus frappant.

Selon de récentes informations provenant du Bureau de l’Administration de l’Industrie et du Commerce de Shanghai, Shanghai totalise plus de 140 000 entreprises privées, de sorte qu’elle se classe première parmi les grandes villes du pays dans ce domaine. Ces entreprises, dont les effectifs s’élèvent à 1,7 millions de personnes, ont en moyenne un capital social de 960 000 yuans. Représentant une part de 6,1 % dans le PNB de Shanghai, le secteur économique privé joue un rôle d’entraînement de plus en plus évident dans l’économie de Shanghai. La valeur ajoutée du secteur privé progresse en moyenne de plus de 15% par an. En 2005, ce secteur représentera 20% du PNB de Shanghai.

Depuis le début de cette année, les taxes versées par les entreprises privées ainsi que par les industriels et commerçants individuels ont augmenté de 44% par rapport à la même période de l’année passée. Dans les cinq ans à venir, ils s’accroîtront en moyenne de plus de 30% par an pour atteindre, dans cinq ans, 16 milliards de yuans.

Le développement des entreprises privées s’oriente progressivement vers l’exportation et s’appuie de plus en plus sur les sciences et techniques. Actuellement, quelque 10 000 entreprises se spécialisent dans les sciences et technologies et les services de conseil en informatique. Or, parmi les entreprises de haute et nouvelle technologie, 17% sont de caractère privé.

Désormais, les services compétents de Shanghai oeuvreront à la création d’un environnement favorable à la concurrence équitable pour les entreprises privées. Concernant les limitations à l’entrée dans les différents secteurs, dorénavant tous les secteurs auxquels les entreprises étrangères ont accès seront également accessibles aux entreprises privées. L’autorisation sera délivrée par la corporation sectorielle. On encouragera les entreprises privées à entrer dans les domaines dont le secteur public s’est retiré et à s’orienter vers les industries de l’informatique, de la biologie, des nouveaux matériaux et des hautes et nouvelles technologies. Par ailleurs, en se développant rapidement, le secteur privé a  absorbé beaucoup de licenciés, qui représentent actuellement 20% de ses employés, ce qui a joué un rôle positif dans l’atténuation du chômage.

2. Les investissements des entreprises privées chinoises ont connu un niveau sans précédent ces 8 dernières années.

Rien que pendant les 9 premiers mois de l’année en cours, les investissements en actifs immobilisés des secteurs collectif et individuel du pays entier ont connu un rythme de croissance exceptionnel, atteignant 957,7 milliards de yuans (+30,3% par rapport à la même période de l’année précédente). Dans le même temps, l’orientation des investissements populaires (notamment celui des entreprises privées) se distingue de plus en plus par sa diversité et le caractère rationnel de sa structure. Par ailleurs, l’économie privée nationale commence à s’introduire dans l’industrie lourde, dans des services du tertiaire comme la finance, l’éducation, la culture, la presse et la publication, ainsi que dans des travaux d’utilité publique comme la construction d’autoroutes et les travaux d’urbanisme. On a vu ainsi apparaître de nouvelles formes d’investissement comme celle de l’“investissement d’entreprises privées associées”. Ce qui attire particulièrement notre attention, c’est que la logistique moderne est devenue un nouveau domaine par lequel les entreprises privées ont accès au secteur tertiaire.

3. Un développement tant en quantité qu’en qualité de l’économie privée nationale.

Selon les statistiques de la Fédération nationale de l’Industrie et du Commerce de Chine, jusqu’à la fin de l’année passée, le nombre des entreprises privées chinoises a été multiplié par 24 en 12 ans et celui des industriels et commerçants individuels a augmenté de 79% durant la même période ; le capital social de l’économie privée a été multiplié par 58 pour atteindre un total de 2 800 milliards de yuans. En même temps que leur développement quantitatif, la qualité des entreprises privées a été, elle aussi, marquée par une amélioration considérable : d’après une étude sur les entreprises privées importantes menée par la Fédération nationale de l’Industrie et du Commerce, on compte dans le pays entier 1 582 entreprises privées dont les revenus d’exploitation annuels se situent au-delà de 120 millions de yuans (la plus rentable d’entre elles voit ses revenus annuels atteindre 35,5 milliards de yuans) ; la croissance annuelle des revenus d’exploitation des entreprises privées (17% en moyenne) est donc largement supérieure à celle du PIB de la même période.

Au moment de rendre public ce rapport, M. Huang Mengfu, président de la Fédération nationale de l’Industrie et du Commerce de Chine, a fait savoir que l’économie privée chinoise est déjà devenue le pôle de croissance le plus actif de l’ensemble de l’économie nationale : alors que le taux de croissance de l'ensemble de l'économie s'élève à 9%, celui de l'économie non publique est de 20%. En 2002 le nombre des industriels et commerçants qui travaillent pour leur propre compte atteint le chiffre de 23, 775 millions, ce qui représente une augmentation de 59% par rapport à l'année 1992.

L'économie non publique représente aujourd'hui 20% du PIB. Fin 2002 les industriels et commerçants individuels et les effectifs qui travaillent dans les entreprises privées totalisent 81, 52 millions de personnes, soit 33% de la population active des villes. Depuis l'année 1992 le secteur de l'économie non-publique crée chaque année, en moyenne, 6 millions d'emplois, soit 75% du montant total de la création d'emplois. A noter que ces nouveaux emplois se situent surtout dans le secteur tertiaire (en 1999, 88,22% des industriels et commerçants individuels travaillaient dans ce secteur).

en 2002, la part de l’économie privée à capitaux intérieurs a atteint à 48,5% du PIB ; dans l’ensemble des agrégats de l’économie nationale, les apports de l’économie privée sont estimés à 25% ; et parmi les 730 millions d’emplois fournis par la société tout entière, 90,3% appartiennent à l’économie privée.

 

Conclusion

Pour juger le caractère du système économique de Chine, il faut nous rendre compte des relations entre le secteur public et le secteur non public, et du rôle joué par l’économie privée en Chine.

On aura une idée des politiques de la Chine à l’égard de la propriété publique et non publique en lisant ces propos de Wen Jiabao, Premier ministre du Conseil des Affaires d’Etat, publiés tout récemment : "Mener en profondeur la réforme du système de gestion des biens publics et des entreprises publiques. Pour y parvenir, nous nous efforcerons de perfectionner les lois et règlements sur la surveillance et la gestion des biens publics et les mesures d’application, d’établir le système budgétaire de l’exploitation des capitaux publics et le système de contrôle de la performance des entreprises en vue de préciser les responsabilités en matière d’exploitation des biens publics. Nous tâcherons de transformer les entreprises publiques en de véritables sociétés par actions selon les conventions en la matière, d’optimiser la répartition des différents systèmes de propriété, de parfaire le système de la personne morale, et de promouvoir le changement du mode d’exploitation des entreprises. Nous développerons énergiquement l’économie de propriété mixte (capitaux publics, capitaux collectifs et capitaux non publics) à travers des prises des participations croisées, de manière à faire progressivement du système par actions la principale forme de réalisation de la propriété publique. Nous continuerons à bien accomplir la réforme et la réorganisation des secteurs des télécommunications, de l’électricité et de l’aviation civile, poursuivrons méthodiquement la réforme des secteurs de la poste et des chemins de fer et orienterons vers le marché les travaux d’utilité publique dans les villes. A travers la réforme et le développement, nous mettrons en place de grandes sociétés et de gros groupes d’entreprises compétitifs, détenant des brevets et des marques de renom. Par ailleurs, nous poursuivrons la réforme des entreprises collectives, afin de diversifier les formes de l’économie collective.

Faire tout le nécessaire pour développer et orienter l’économie non publique. Les gouvernements aux divers échelons devront assainir et réviser au plus tôt les lois et les politiques qui freinent l’essor de l’économie non publique, appliquer les mesures destinées à assouplir les conditions d’accès au marché, et continuer l’étude et l’élaboration de dispositions concrètes visant à encourager les entreprises non publiques à participer à la réorganisation et à la rénovation des entreprises publiques et à entrer dans la construction d’infrastructures, les travaux d’utilité publique et les autres secteurs et domaines. Il faudra prendre des mesures destinées à assurer aux entreprises non publiques le même traitement que les autres secteurs en matière d’investissement, de financement, d’impôt, d’utilisation de terrains et de commerce extérieur, protéger leurs droits et intérêts légitimes, améliorer les services et les contrôles à leur égard, et aider et encourager celles réunissant les conditions nécessaires à se transformer en grandes entreprises compétitives. Enfin, il faudra accélérer la mise en place d’un système de propriétés moderne”[3].

Ce texte résume bien les lignes directrices de la réforme de la propriété à l'étape actuelle du socialisme : 1° La réforme de la gestion des entreprises publiques vise à la fois à leur laisser une grande autonomie et à les contrôler adéquatement. Autrement dit il s'agit à la fois de les soustraire aux pressions politiques et aux lourdeurs administratives, qui empêchaient notamment de prendre la mesure de leur efficacité, et de s'assurer du bon usage des capitaux publics, notamment à travers la Commission de supervision et d'administration des actifs de l'Etat, chargée (en lieu et place des ministères et autres commissions enchevêtrées) de représenter l'Etat en tant que propriétaire ou actionnaire. Ceci s'applique particulièrement aux services publics, sur lesquels se concentrent les investissements publics 2° Le développement de la propriété mixte doit faciliter l'apport de capitaux tout en conservant le rôle dominant de l'Etat ou des autres collectivités publiques par le biais du contrôle majoritaire et des participations croisées. 3° L'économie collective (par exemple les coopératives) n'est pas négligée, on cherche au contraire à la développer en la diversifiant. 4° L'économie privée est encouragée : en lui assurant les mêmes conditions de développement qu'à l'économie publique, on favorise une saine concurrence entre les deux. 5° Enfin il s'agit de faire face à la mondialisation en stimulant la création d'entreprises capables d'affronter les multinationales capitalistes sur le marché mondial. La réforme du système de propriété vise à être à la hauteur de tous ces enjeux.

 

notes:

[1] A la question de savoir si l’on peut supprimer d’un seul coup la propriété privée, Engels a répondu : "Non, pas plus qu’on ne peut accroître d’un seul coup les forces productives déjà existantes dans une mesure telle qu’on puisse établir une économie collective du jour au lendemain. La révolution prolétarienne, dont tout indique qu’elle approche, ne pourra par conséquent que transformer peu à peu la société actuelle et ne pourra supprimer complètement la propriété privée que quand on aura créé la quantité nécessaire de moyens de production”. (Marx, Engels, Principes du communisme, in Oeuvres choisies, t. 1, Editions du Progrès, Moscou, 1978, p. 91).[1]

On peut citer aussi Marx dans la Préface à sa Contribution à la critique de l’économie politique : “Une formation sociale ne disparaît jamais avant que soient développées toute les forces productives qu’elle est assez pour contenir, jamais des rapports de production nouveaux et supérieurs ne s’y substituent avant que les conditions d’existence matérielles de ces rapports soient écloses dans le sein même de la vieille société" (Marx, Engels, Œuvres choisies, ibidem, p. 525).

[2] Un exemple frappant. Tout le monde sait que la Chine est réputée dans le monde pour sa cuisine dont les caractéristiques consistent justement à satisfaire des goûts diversifiés. Dans les années 50, il existait à Pékin quelques milliers de restaurants privés, qui, le plus souvent tenus par un couple, portaient le nom de leur propriétaire. Pendant la Révolution culturelle, ces restaurants avaient pratiquement disparu avec leurs spécialités. On avait peu de choix et les restaurants offraient des plats qui avaient les mêmes goûts. Aujourd'hui toute la diversité d'autrefois est réapparue.

[3] Wen Jiabao, "Rapport d'activité du gouvernement, présenté le 5 Mars 2004 à la deuxième session de la X° Assemblée populaire nationale, in Quotidien du peuple, 15 Mars 2004.

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